Se droguer pour survivre

Ils sont passés par le Phare en Carreaux, n'y sont pas restés longtemps et sont repartis vers l'Est en essayant de longer la côte.
En passant, Il a fouillé des yeux l'endroit  où "Touffe de Poils radioactifs", la loutre que Natie avait failli adopter avait disparu, mais l'animal n'a plus l'air d'être dans le coin.
Ils auraient pu faire une pause, mais assez bêtement, il faut l'avouer, il a forcé l'allure et ils sont arrivés là où ils se trouvent maintenant.
Un relief varié, où plaines, forêts, marécages semblent se côtoyer dans la joie autour d'un cadavre de rat géant dépecé.

Ils se sont installés non loin du cadavre, attendant le passage de lune qui allait tarder et échangeant leurs faibles réserves de nourriture et de vivres en tout genre. Il y avait une caisse, presque vide.

La lune passe enfin.
C'est l'heure des décisions.
Et il ne s'agit pas de faire la balance des instruments, mais de décider de la vie de chacun.

Il prend un air un peu cérémonieux.

Les filles,
Barry.

Il fait moins chaud. Cela fait du bien.
Mais nous sommes loin d'être sortis d'affaire.
Il regarde dans la mare, à côté d'eux quand ils sont arrivés, un tas de rongeurs s'en est échappé.

J'ai l'impression que contrairement aux jours et semaines précédentes, l'eau se fait moins rare.
Les rats, ça sait ce que ça peut bouffer et manifestement, l'eau de cette mare dégueulasse est potable.
Mais ça se filtre, ça...

Le gros là.
Il montre le cadavre du rat géant... Je ne pense pas qu'il soit mort empoisonné et ceux qui ont pris sa viande ne le pensaient pas non plus.
Par contre, je pense que ça ne va pas durer et que l'eau va manquer de plus en plus.

Il s'étire, fait quelques pas, il tourne presque en rond.
Eh vous avez vu ?
De l'autre côté, il y a une caisse !

Il leur tourne le dos, se met sur la pointe des pieds pour mieux la voir.
Vous pensez qu'on peut traverser là ?

Il leur fait face à nouveau.
J'aime beaucoup les caisses.
Il prend un air gêné.
Oui, je vous l'ai déjà dit.

Il prend un air décidé.
On a besoin d'eau.
En grande quantité.
On en a discuté, avec Barry et ça pourrait être ça qui fera la différence dans les semaines à venir !
Hein Barry ?
Donc il faut en trouver beaucoup et en mettre de côté le plus possible.

On a aussi besoin de bouffer.
Il regarde Soliste... et c'est toi qui est la spécialiste ici, je pense.
Il montre la zone où les rongeurs se sont réfugiés, après leur arrivée.

Il regarde Clara... Nous on ne sait pas faire grand chose d'utile à part trouver des herbes médicinales...

Je pense...
Même si je sais que ça fait débat.

Un grand sourire et il sort un genre d'amas de substances plastiques de sa poche, dans son autre poche, il sort un briquet...

On en trouvera plus si on est défoncés...
Un clin d'oeil à Barry.
Hein ?

Il allume déjà le truc et se met à respirer à plein nez les effluves du tas qui se contracte sous la chaleur.
*Kof ! kof ! Kof !*
Waouh... ça arrache...
Les yeux sont déjà plus rouges que brillants.
Il s 'agite.
Vous faites comme vous voulez... Mais moi, je vais bosser !
Il se dirige vers le nord, fouillant les buissons comme s'il était énervé, se penchant pour récolter quelques plantes qui doit reconnaître.
Il fait quelques pas, se redresse, se soulève sur la pointe des pieds, toujours à regarder vers la caisse, au loin.
Il se retourne brusquement.

Je vais demander un truc à la radio !
Honnêtement, j'arrive à entendre ce qui s'y raconte, mais je ne sais pas trop si on m'entend vraiment moi.

Il se rapproche du groupe, avec un air si sérieux qu'il doit commencer à leur faire peur.

Il prend un air de conspirateur.
J'ai une idée pour vérifier ça.

Il a rangé son briquet mais il tient toujours quelques bouts de plastique entre ses doigts, il glisse les plantes déjà trouvées dans une poche latéral de son sac et ressort son briquet.
Il relève les yeux vers eux.
Pour me donner du courage !
Allumage, consummage, grande respiration de la fumée.
Une sale grimace, il retrouve leurs regards.

Dès fois, j'ai l'impression que nous sommes tous imaginaires...
Il se marre.
Tout seul sans doute.
Il tangue un peu
Un tremblement de terre ? qu'il bredouille

Il essaye de mettre en route sa radio tout en repartant vers là où il était se mettant encore sur la pointe des pieds à regarder la caisse lointaine.

Il doivent entendre ce qu'il y raconte.
-->Pouvez-vous m'aider<--
Pas sûr qu'ils y comprennent grand chose.

Il a coupé sa radio, cherchant frénétiquement dans les buissons environnants.
Il s'interrompt quand Soliste l'interpelle.

Non pas du tout.
Pas du tout l'effet d'un joint.

Il repart dans un buisson proche.

Le joint, t'es zen.
Là, tu n'es pas zen du tout.

Un autre buisson.

Par contre, la pêche que t'as !
Un grand sourire, puis un soupir...
Faut juste pas avoir trop besoin de réfléchir.
T'as pas trop le temps en fait...

Il doit lui frôler l'épaule quand il passe derrière elle.
Si elle se retourne, elle le trouve à quatre pattes à fouiller dans un talus.

Clara n'avait rien dit quand Bobby s'était lancé dans son monologue, elle n'avait pas non plus bougé quand il avait voulu parler à la radio quitte à passer pour un cinglé, elle l'avait même laissé fouiner comme un animal dans les fourrés à la recherche de plantes... Mais quand Soliste lui pose une question et qu'il lui donne sa réponse, elle se lève d'un bond vers la jeune fille pour se trouver nez à nez avec elle. Elle a l'air, non pas seulement l'air, elle est carrément furax. Elle souffle lentement avant de lâcher :

C'est de la merde !  Le plastique comme tout ce qu'il te raconte : c'est de la merde.

Un regard vers les fourrés, les yeux qui montent vers le ciel et se tournent encore vers l'ado.

Les joints c'est plutôt soft si on en abuse pas trop, mais le plastique c'est comme si tu fumais du goudron à la place des clopes. Et à ton âge, ça pourrait te griller complètement le cerveau. T'en as pas envie et moi non plus je veux pas que ça t'arrive.

Elle se recule enfin après lui avoir parlé à deux doigts du nez, littéralement, pendant tout ce temps. Elle se retourne vers Bobby qu'elle chope par son T shirt quand il fait une pause et elle lui balance une grosse baffe au passage.

Laisse la tranquille avec ces conneries. Le monde ressemble plus à rien. Elle, elle a encore une chance de pouvoir faire quelque chose de sa vie.

Elle finit par le lâcher. S'il est encore lucide, il tiendra debout, sinon il finira sur le cul. La brune va un peu plus loin à l'écart pour chercher des plantes, gardant un œil sur ce qui se passe au camp.

Barry observait la scène, sans rien dire, mais avec un intérêt non feint. Il hocha dérechef de la tête pour confirmer les dires de Bobby au sujet de l'eau, qui se mua en un sourire angélique lorsque le sujet du plastique tomba sur la table.

Sachant les avis sur le sujet partagés, si ce n'est tranchés au hachoir, il s'absteint quelque peu d'en faire l'apologie tout de suite après la démonstration équivoque du chef de groupe. Surtout qu'il n'avait pas envie de prendre une claque de Clara sur le museau, pas fou le Barry.

Alors, il se décida à prendre la parole une fois les esprits quelque peu refroidis, Clara à distance raisonnable de baffe, et Soliste à portée d'oreille.

T'veux savoir c'que ça fait, l'plastique ? La Clara a pas tort, c'est d'la merde. L'Bobby a pas tort non plus, c'pas comme le joint.

Voyant que Clara pouvait à tout moment s'agiter et fondre sur lui, le hippie se tourna vers elle et lève les mains paumes vers le ciel en signe d'innocence. Ou bien était-ce du dédouanement ?

J'préfère prév'nir qu'guérir. La p'tiote demande, j'pense qu'c'est bien qu'elle soit au courant. Et j'pense qu'un avis... Il se présente soi-même de ses doigts. ...éclairé sur la question, v'nant d'quelqu'un qui sait d'quoi il parle, c'peut pas faire d'mal.

N'attendant pas de réponse, certain de son bon droit, il se retourne vers la jeune intéressée, pédagogique.

J'pense déjà qu'ça fait pas l'même effet sur tout l'monde. C'reste d'la drogue, et pour ça, tout l'monde réagit pas pareil. Tu vois l'Bobby ? Y perd un peu la boule j'ai l'impression. Mais ça s'voit qu'il est plus rapide dans ses gestes. T'vois, ça modifie ta perception d'la réalité. Mais ça la change pas, la réalité ! Tu m'suis ?

L'homme marque une légère pause avant de reprendre.

C'comme si t'prenais d'bonnes grosses lattes sur un ter, par exemple. Bah y'en a qui vont voir des trucs, d'autre qui vont plutôt s'sentir posés, d'autres flippés.. Ç'varie, quoi. L'plus important, c'est d'faire ça dans un contexte où tu t'sens en sécurité. L'contexte, c't'important. Surtout pour les hallucinogènes, mais c't'une autre histoire.

Là, pour l'plastique, c'comme un mixte 'vec une trace de speed et une grosse gueule d'bois. Ça t'réveille, donne un bon coup d'fouet, mais ça dure pas long et t'es cueillie derrière par un sale mal de crâne. 'Fin moi c'comme ça qu'je l'vois. Et c'sûr qu'si tu cherches que'que chose pendant qu't'es sous plastoc, bah t'trouveras probablement plus vite.

Il observe l'assemblée, d'un air presque théâtral.

C'pour ça qu'bah sniffer un ptit coup d'plastique qui t'nique les naseaux et l'cerveau, ça t'enlève un an de vie quand tu s'ras vieille mais ça t'permet d'l'atteindre, ta vieillesse.

Il sourit enfin, et sort sa ration de plastique de sa poche ainsi que son briquet.

Après chacun sait c'qu'il peut s'permet' pour la survie d'plus grand nombre ! Moi, j'vais tenter d'trouver d'l'eau, par exemple, et c'sera d'jà pas mal.